Si vous êtes lyonnais, cela ne vous a sûrement pas échappé : la ville de Lyon vient d’être choisie pour être la vitrine touristique de la France à travers le programme «Lyon et Paul Bocuse fêtent 50 ans d’excellence gastronomique».

L’objectif de ce programme de trois ans par OnlyLyon ? Positionner notre ville comme « la destination culinaire incontournable en France et en Europe ». Amoureux de Lyon depuis ma naissance (et même un peu chauvin), j’ai d’abord été très enthousiaste à la lecture de l’annonce. Puis je me suis ravisé… Qu’est-ce que cela va vraiment changer ? A part voir toujours le même peloton d’élus, d’organismes, d’entreprises et de chefs, se gargariser, se regarder le nombril et se reposer sur ses lauriers ?

50 ans d’excellence gastronomique ? Certes… Mais les 50 prochaines années ?

Les lignes qui suivent vont jeter un pavé dans la marre et risquent d’en éclabousser quelques uns mais, c’est finalement ce que la plupart des gens qui gravitent dans le secteur de la gastronomie pensent aujourd’hui…

La « vitrine gastronomique » lyonnaise a toujours été aux manettes de quelques groupes, dont notamment l’hégémonie Bocusienne et la secte des Toques Blanches. Toujours les mêmes restaurants mis en avant, toujours les mêmes chefs plébiscités… Des restaurants soi-disant incontournables qui ont pignon sur rue en presqu’île ou dans les quartiers les plus touristiques mais qui proposent des tables de qualité parfois moyennes et à des prix souvent limites. Un groupe de brasseries qui attire des touristes juste grâce à un nom connu. Ce même groupe qui n’a pas su garder la meilleure chef que la ville de Lyon ait connu sur cette décennie.

Au final ? Des touristes surtout déçus de la gastronomie lyonnaise.

Pour avoir accueilli des dizaines de AirBnb chez moi dans mon appartement du 1er, je peux vous dire que j’en ai vu passer des américains, des Taïwanais, des Italiens, des Allemands et des Sud-Africains venus spécialement à Lyon pour sa gastronomie. 

La majorité des touristes ne pense pas forcément à regarder les blogs, Yelps ou autres guides alternatifs. Mes AirBnB se rendaient à l’Office du Tourisme, découvraient les guides lyonnais recommandant les « adresses incontournables de l’Excellence Gastronomique » et finissaient au Passage, chez Léon de Lyon ou au Sud (déboursant une belle petite somme pour la qualité servie) et rentraient chez moi.

Toujours la même question de ma part (connaissant déjà la réponse) : Alors ?

Toujours la même réponse de leur part : Well, let’s be honest. We expected something better… 

Comme je ne voulais pas que ces touristes repartent sur une note moyenne et décevante, je leur dégainais les vraies bonnes adresses plébiscitées par les lyonnais eux-mêmes (parfois Toques Blanches d’ailleurs, cet article n’est pas extrêmiste non plus) : Daniel et Denise, Palégrié, L’Ourson Qui Boit, le Kitchen Café, Imouto, Sapori e Colori, le Cafe Sillon… J’en passe et des meilleurs car oui, Lyon regorge d’adresses merveilleuses, de jeunes talents, de chefs incroyables et de lieux magiques. Les retours des AirBnb étaient alors sans équivoque.

Gravlax, racines et émulsion à la cardamome noire au Kitchen Cafe
Gravlax, racines et émulsion à la cardamome noire au Kitchen Café

Lyon a en effet tout le potentiel pour être une véritable vitrine de la nouvelle gastronomie. En revanche, nous avons du pain sur la planche pour dépoussiérer ce merdier et valoriser tout ce que Lyon a à offrir : une sacrée brochette d’incroyables chefs japonais qui ont absolument tout compris à la cuisine française, des profils humbles, créatifs et audacieux comme Hubert du Substrat, Cyril et Alexandre de Shack, Connie et Laurent du Kitchen Café…. Sans parler des bars à cocktails et spots de burgers qui n’ont rien à envier à la capitale. 

Substrat Restaurant © Nicolas Villon
Substrat Restaurant © Nicolas Villon

Et pour que Lyon soit une véritable capitale de la gastronomie en phase avec son époque, il ne faudra pas juste redonner du sens aux classements et promotions des jeunes talents. 

Il faudra que ces derniers se rassemblent et parlent d’une seule et même voix. La voix d’une génération de jeunes chefs, humbles, créatifs et qui n’ont pas peur de de dépoussiérer la gastronomie lyonnaise avec leurs inspirations puisées à l’étranger.

Il faudra également que des initiatives autour de la cuisine se mettent en place. Des initiatives autour de l’agriculture et des fermes urbaines, de supermarchés collaboratifs, de l’épicerie sans emballage, des potagers collectifs partagés, pas uniquement réservés aux roots, bobos et autres hipsters.

Des initiatives intelligentes et collaboratives qui offriront aux jeunes talents et au public, une cuisine locale, durable et moderne. C’est uniquement en ce sens, à mon avis, que nous pourrons être une vitrine de la gastronomie de demain.

Incroyables Comestibles Lyon
Incroyables Comestibles Lyon

 

10 réponses

    1. Le guide du Fooding a été la réponse à la poussière, au conformisme, aux régles dépassées et à la complaisance du Michelin. La réponse s’appelle mutualisation des talents et des ego et communication maligne à l’ère du digital. Et là tu devrais avoir des idées. En tout cas, moi j’en ai!

      Khmerouge

  1. Super original ! Est-ce qu’on ne ressert pas les mêmes articles dans toutes les villes où la tradition est très ancrée ? Est-ce que quand on va en Belgique on ne veut pas manger les moules-frites, ou le cassoulet à Toulouse ? Est-ce que l’on s’attend alors à manger quelque chose de méconnu ? Est-ce que toutes les villes qui ont des « trois étoiles » n’en sont pas absolument fières ? Enfin, puisque l’on parle de Substrat, la solidité des traditions culinaires n’est-elle pas le meilleur moyen d’avoir confiance dans l’avenir ? La preuve en est d’ailleurs qu’à Lyon, et ailleurs aussi, la relève est là et, toute moderne qu’elle soit, formée par des chefs traditionnels.

  2. Vraiment chouette cet article engagé ! Tu sais à quel point je te rejoins, mais j’appellerai quand même certaines de ces vieilles brasseries « les belles endormies » (super bouquin d’ailleurs). En effet, pléthore de gentils dinosaures, mais je rêve que l’un d’entres-eux se réveille et concilie les deux mondes. Redorer le blason d’institutions populaires et dépoussiérer certains lieux qui peuvent marier volume et qualité. Malgré tout l’amour que j’ai pour les nouvelles petites tables (20-30 couverts), j’aime aussi pousser les portes de temples qui abritent des dizaines de tables guidant le ballet des serveurs. Nous pourrions enfin sortir de certains lieux l’estomac un peu plus léger et le porte-monnaie un peu plus lourd !

  3. Je partage tout à fait cet avis, et je dois dire que mon Panthéon est à peu près le même. Même si pour le coup le terme Panthéon n’est peut être pas le mieux choisi. Mais c’est vrai qu’à Lyon, on peut se régaler sans y laisser un bras.

  4. Vieux compagnon de route des bostrits LEON,PALAIS ou autres , on se faisait une joie de participer e0 TOUS AU RESTO Le menu servi aux 10 convives nous a laisse9 sur notre fin !!!Pate9 ! Hachi aux abats ! et ile flottante maison????On aurait espe9re9 un peu mieux pour cette occasion !Car malgre9 la promo,on a pris ape9ro, vins etc !!Pas bien envie de revenir ou de faire l’article !!Pour infodaniel

  5. Tout à fait d’accord ! J’adore Lyon et heureusement Yelp est passé par là avec toutes ses bonnes adresses, car avant cela, on a souvent été déçus par les restaurants supposés être « typiques » et pourtant bien trop poussiéreux.

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